Papier à lettres

Ni dessins politiques, ni articles de presse, ces « papiers à lettres » de Gébé, publiés dans Charlie Hebdo entre 1993 et 2003, composent un ensemble en marge d’une œuvre déjà qualifiée de marginale et de protéiforme. Regroupée en un volume, la totalité de ces planches nous rappelle toute l’audace dont était capable cet aventurier peu commun que l’on a encore du mal à classer : dessinateur, reporter, écrivain, polémiste, humoriste, auteur dramatique, scénariste et metteur en scène de cinéma et de romans-photos. La plupart de ces pages d’un format inhabituel nous révèlent un Gébé dédoublé, mêlant souvent les dessins intimistes et intemporels de sa maison, de son atelier et de son jardin à des textes soigneusement calligraphiés d’une actualité politique à chaud, lue dans un journal ou entendue à la radio. Le poète se confond avec le polémiste, et c’est là toute l’originalité de ces « papiers à lettres » qui lui tenaient à cœur. Il est probable que cette expérience n’ait pas d’équivalent dans l’histoire du dessin, sauf à les rapprocher de certaines pages de Fournier, de Willem et de Siné où le texte rivalise avec l’image.