Soeurs
Au volant de sa Ford Taurus, Geneviève Bergeron pleure en écoutant la voix sublime de Ginette Reno : L'essentiel, c'est d'être aimé. Elle, l'avocate brillante qui a voué sa carrière à la résolution des grands conflits, elle, la célèbre médiatrice, est incapable de nommer le moindre de ses désirs. Sa jeunesse est passée. Elle le comprend là. Elle pense au visage amaigri de sa mère, à la langue défaite de son père et au silence de la banquette arrière de sa Ford taurus sur lequel nul siège enfant n'a jamais été attaché. Elle pense à cela, à ce vide soudain, à cet étrange brouillard qui vient de l'envahir.
Ainsi en va-t-il des prémices de Soeurs dont le pluriel appelle a une ouverture malgré l'unique personnage de cette pièce. Car si Geneviève Bergeron est la première femme de cette tempête, rien ne laisse présager le surgissement de cette autre femme.
Pourtant surgissement il y aura. Collision pourrions-nous dire, qui fera de ces deux êtres féminins les réceptacles de a grande Histoire, de ses violences et de la manière avec laquelle l'intimité des êtres parvient à tenir tête aux brutalités du temps.