Légicom N°50. Les renouvellements de la liberté d'expression.
Le journaliste diffamateur est présumé de mauvaise foi. Pour détruire cette présomption et lui permettre d'être exonéré de responsabilité, il doit traditionnellement rapporter la preuve de quatre éléments : la légitimité du but poursuivi, le sérieux de l'enquête, la prudence dans l'expression et l'absence d'animosité personnelle. Or, sous l'influence de la Cour européenne des droits de l'Homme, est apparu le critère de " débat d'intérêt général " pour apprécier la bonne foi du journaliste professionnel. Se pose alors la question de la portée de cette référence et son articulation avec les critères traditionnels de la bonne foi. En outre, ces critères s'apprécient différemment selon le genre de l'écrit en cause et la qualité de la personne qui s'y exprime. Il en est ainsi dans le domaine de l'expression humoristique, littéraire, de même en matière de polémique politique, de témoignages vécus ou d'interviews. Par ailleurs, la protection pénale de certains " secrets " vient souvent heurter de plein fouet la liberté d'informer, mais également mettre en exergue l'existence de conflits de secrets. Ainsi, l'avocat est tenu au secret de l'instruction comme au secret professionnel. Mais parfois, les droits de la défense - qui passent par une nécessaire liberté d'expression - peuvent justifier qu'il y soit porté atteinte, comme en attestent d'ailleurs plusieurs décisions récentes. Presse et justice ont chacun leur secret : " de l'enquête et de l'instruction " pour le juge notamment, et " des sources " pour les journalistes. Or la recherche de la vérité passe par la connaissance, voire la divulgation des informations couvertes par le secret de l'autre. Quel équilibre envisager dès lors, au regard des affaires récentes, des dernières jurisprudences et de l'annonce par Christiane Taubira d'un nouveau projet de loi sur le secret des sources ? Une récente proposition de loi visant à instaurer un délit de " violation du secret des affaires des entreprises " pose la question des éventuelles restrictions du droit à l'information que pourrait faire peser une telle incrimination. La question de cet équilibre se pose également en matière de " secret de la vie privée ". Toutes ces questions ont été discutées par d'éminents juristes et professionnels de l'information, à l'occasion du Forum Légipresse 2012. Leurs interventions sont reproduites dans ce numéro.