La nature est un champ de bataille
Nous sommes entrés dans une crise écologique prolongée, d’une ampleur sans précédent. Face à la catastrophe annoncée, les bonnes âmes appellent l’humanité à « dépasser ses divisions » pour s’unir dans un « pacte écologique ». Cet essai polémique s’attaque à cette idée reçue. Il n’y aura pas de consensus environnemental. L’unanimisme ne saurait en la matière être que de façade. Loin d’effacer les antagonismes existants, la crise écologique se greffe au contraire à eux pour les porter à incandescence. La nature devient un champ de bataille. L’humanité ne subit pas uniformément les conséquences de la crise écologique. Elle est divisée par d’abyssales inégalités environnementales. Soit la localisation des décharges toxiques aux États-Unis : si vous voulez savoir où un stock de déchets donné a le plus de chances d’être enfoui, demandez-vous où vivent les Noirs, les Hispaniques, les Amérindiens et autres minorités raciales. Interrogez-vous par la même occasion sur le lieu où se trouvent les quartiers pauvres… Ce « racisme environnemental » qui joue à l’échelle d’un pays vaut aussi à celle du monde. Pollution, catastrophes naturelles ou industrielles, qualité de l’eau, accès à l’énergie : autant de situations très inégalement partagées. « Marchés carbone », « droits à polluer », « dérivés climatiques », « obligations catastrophe » : on assiste à une prolifération des produits financiers « branchés » sur la nature. Faute de s’attaquer à la racine du problème, la stratégie néolibérale choisit de financiariser l’assurance des risques climatiques. C’est l’essor de la « finance environnementale » comme réponse capitaliste à la crise. Surcroît de catastrophes naturelles, raréfaction de certaines ressources, crises alimentaires, déstabilisation des pôles et des océans, « réfugiés climatiques » par dizaine de millions à l’horizon 2050… Autant de facteurs qui annoncent des conflits armés d’un nouveau genre, auxquels se préparent aujourd’hui les militaires occidentaux. Finie la guerre froide, bienvenue aux « guerres vertes ». De la Nouvelle-Orléans au glacier Siachen en passant par la banquise de l’Arctique, l’auteur explore les lieux marquants de cette nouvelle « géostratégie du climat ». Cet essai novateur de théorie politique fournit une grille de lecture originale et critique, indispensable pour saisir les enjeux de la crise écologique actuelle. À travers l’exposition édifiante des scénarios capitalistes face au désastre environnemental, il fait oeuvre – salutaire – de futurologie critique.