Matins mexicains et autres essais
Lawrence a séjourné à deux reprises au Nouveau Mexique, en 1922-1923 et en 1924-1925, et il a voyagé au Mexique lors de ces deux séjours qui lui ont inspiré son roman Le Serpent à plumes.
Le livre contient les huit essais de Mornings in Mexico, recueil publié par Lawrence lui-même en 1927, qu’il décrit dans une lettre à sa soeur comme "un petit livre d’essais sur les Peaux-Rouges et le Mexique", mais aussi dix essais supplémentaires, écrits entre 1922 et 1928 sur le même thème de l’Amérique et de ses premiers occupants, les Indiens.
Chronologiquement, le premier de ces essais est écrit peu après l’arrivée de Lawrence aux États-Unis. L’Amérique le hantait depuis longtemps comme le lieu d’une utopie possible, loin de l’ancien monde broyé par la Première Guerre mondiale à laquelle il s’était violemment opposé. Et elle continue de le hanter longtemps après son départ. C’est dans le dernier texte du volume, écrit à Paris en 1928, qu’il résume le mieux les raisons de son attachement : "Je pense que le Nouveau Mexique fut pour moi la plus grande expérience que le monde visible m’ait donné de vivre. J’en ai assurément été changé pour toujours". À cette expérience immédiate de la beauté d’un pays s’ajoute, plus importante pour Lawrence, la rencontre avec les Indiens et leur religion. Or c’est auprès des Peaux-Rouges, dont il décrit les danses auxquelles il a pu assister, qu’il a la révélation de ce qui lui semble "la plus vieille religion" qui soit.
Ce qui frappe, à la lecture de la traduction magnifiquement enlevée de Jean-Baptiste de Seynes, c’est la vivacité du regard du merveilleux observateur qu’est Lawrence, son intelligence caustique (certains textes sont des satires féroces de l’Amérique et des Américains), le refus sans cesse réaffirmé de s’en tenir aux lieux communs. Jamais il ne joue à l’ethnologue, jamais il ne fait semblant de s’effacer pour une description objective.