Rendez-Vous de Caluire (le)
Le cantonnier Rougis n'est pas de bonne humeur : ce mois de juin s'annonçait beau et voilà que le temps se gâte aujourd'hui. Et, sous la pluie, son travail n'est pas une sinécure... Alors qu'il emprunte la voie Castellane, il est surpris par le crépitement de quelques coups de feu, A cinquante mètres devant lui, il aperçoit un jeune homme vêtu d'un costume de tweed marron rouille qui s'enfuit en courant un zig-zag, sans doute pour éviter les balles tirées dans sa direction.
Bien que les tireurs soient en costumes civils, leurs imprécations indiquent au cantonnier qu'il s'agit d'Allemands. « La Gestapo », pense-til. Le fuyard, qui a les mains libres, sans menottes, sans arme, longe la haie qui borde la route, saute dans le fossé, profond d'un mètre et tapissé de hautes herbes et d'orties.
Cependant, place Castellane, devant le cabinet du docteur Dugoujon, il y a grande agitation. Trois voitures noires stationnent, dans lesquelles les Allemands poussent brutalement six ou sept prisonniers menottés. Parmi eux, Rougis reconnaît le médecin du quartier, le docteur Dugoujon. Les portières claquent, les véhicules quittent la place, descendent vers la Saône...
L'évadé se relève, chasse les brindilles collées à ses vêtements et disparaît précipitamment par la ruelle qui mène au fleuve. Ainsi commence l'affaire de Caluire, le mystère de René Hardy et la légende de Jean Moulin.