La nostalgie de l'aile
Voici l'histoire d'une non-histoire, celle d'un homme qui aurait préféré ne pas être. Afflublé d'un corps qui n'a pour lui que peu de réalité, il peut sans difficulté exister à côté de son enveloppe charnelle. Il devient alors observateur de sa propre identité et revient à la source, celle de son enfance.
Une enfance marquée par un double manque : la relation avec un frère aîné qui habitait sous le même toit, mais qui était exclu du noyau familial, et la présence-absence d'un troisième enfant dont il occupe la place dans l'imaginaire familial.
En grandissant, il recherche le frère manquant. Il l'a découvert jeune adulte en la personne d'un étudiant qui semblait exister à sa place. Cet Uriel moderne, archange solaire, ne t qu'accentuer la solitude mortelle causée par l'effacement de sa personne. Une seconde rencontre, celle d'un chanteur tout aussi angélique, creuse cette disparition de soi comme programmée dès l'enfance.
Ce récit d'une construction malgré soi, traversé par une nostalgie sans fond, tempéré par la présence bienveillante de la famille actuelle du narrateur et par la révélation de la radio - où le son prend la place du corps - emmène le lecteur dans un univers à l'écriture singulière et sensible.
Une expérience de lecture proche de l'apnée où Pascal Goffaux nous emmène dans l'intimité de son enfance, avec un humour noir, mordant, à la limite de l'autosabotage. Laurent Quillet explore cette non-présence au monde dans un travail d'effacement volontaire de sa personne sur d'anciennes photos de famille. Les univers de ces deux hommes se rejoignent et se répondent. Dans leur démarche d'absence et de retrait du monde, ils ont trouvé leur alter ego.