Sauvages blancs ! : Chroniques tunisiennes 1911-1927
Jossot est un caricaturiste reconnu, encensé et redouté quand, en 1911, il décide de plaquer la presse parisienne et part s'installer en Tunisie. Mais cet indigné chronique ne peut rester muet bien longtemps et, troquant le crayon pour la plume, il se fait pamphlétaire dans les journaux tunisiens. Sauvages Blancs !, le recueil de ses articles patiemment établi par Henri Viltard, montre bien que ni le déracinement, ni le changement de mode d'expression n'ont entamé sa capacité de révolte. Il garde le même regard aigu, la même férocité pour fustiger la bêtise, l'ignorance et les préjugés. Lui qui admire la culture musulmane, qui s'est converti à l'Islam en 1913, se montre plus que tout horrifié par le comportement des colons, leur mépris des habitants et des coutumes locales, par cette supériorité imbécile qu'ils tirent du fait d'être prétendument "civilisés". Mais malgré son zèle de nouveau converti, Jossot est loin d'être un naïf et un candide, ses critiques ne s'adressent pas qu'aux Européens. Les défenseurs de traditions religieuses archaïques tout comme les autochtones qui singent les manières des colons, ceux qui prônent une "assimilation" qu'il considère comme un avilissement, tous se trouvent cinglés, raillés, mis à nu par une plume au vitriol. Tout est sujet à polémique pour Jossot, il ne se censure jamais : les méfaits de l'instruction, le port du voile, les mariages mixtes, les mauvais traitements sur les animaux, l'intégrisme religieux, la folie meurtrière des sociétés occidentales, ou le colonialisme, sont tour à tour passés au crible de son sens aigu de la liberté.