Le Travail et l'Islam - Généalogie d'une problématique
Depuis quelques années, la laïcité fait régulièrement l'objet de controverses politiques et publiques. Elle serait mise en cause dans la majorité des secteurs du monde du travail (entreprises, services publics, associations) par la présence et l'affirmation de pratiques religieuses « nouvelles ». Bien-sur, dit ou mal-dit, c'est presque toujours de l'islam dont il s'agit. Sauf que l'expression des convictions religieuses des musulmans au sein du monde du travail en France n'est pas inédite. Les travailleurs immigrés maghrébins d'après-guerre, appartenant aux classes les plus désoeuvrés de la classe ouvrière, pratiquaient pour la plupart sur leur lieu de travail, sans que cela ne suscite d'émois particuliers. Des entreprises de renoms ont même construits des salles de prières pour leurs salariés musulmans. Alors, il faut s'interroger : qu'y a t-il de véritablement « nouveau » dans la situation actuelle ? De quoi s'émeut-on vraiment ? Mais ce n'est pas suffisant. Car il faut également questionner le structurel dans le conjecturel, ce qui perdure malgré les contextes changeants. Et ainsi se confronter à cet arrière-fond théorique qui continue d'organiser, implicitement ou explicitement, une certaine manière de penser la relation entre la religion et le travail en général, et entre l'islam et le travail en particulier. C'est cette thèse, si structurelle en sciences sociales, qu'il y aurait des modes de vies religieux plutôt favorable au travail moderne tandis que d'autres, dont l'islam, lui serait plutôt défavorable. Là encore, à la lumière des réalités contemporaines, qu'en est-il réellement ?