Chroniques des invisibles : De l'exil à Avignon : récit d'une création
Ils sont les invisibles, ceux que l'administration ne veut pas voir, ceux qu'on parque ou qu'on chasse, ceux qui se lèvent tôt et qui rentrent tard, qui habitent des campements ou des squats insalubres. Ils vivent ici. Ils travaillent ici. Mais ils sont privés d'espace public, évitent les lieux où sont les Blancs et ne fréquentent pas les cafés, les parcs, les cinémas ou les théâtres, par peur des rafles et des contrôles. Parce qu'ils sont sans papiers et sans toit, ils sont sans voix et sans visage. Ils habitent une ville qui double les coutures de celle que d'autres arpentent au grand jour, librement. En mai 2015, huit d'entre eux ont pris le risque de venir en pleine lumière. Eux, ce sont les « quatre-vingts d'Auber », les habitants d'un squat situé au 81, avenue Victor-Hugo, à Aubervilliers. C'était leur adresse, c'est devenu un spectacle et l'histoire d'une lutte pour la régularisation. Récit littéraire et enquête anthropologique, Chronique des invisibles raconte cette aventure depuis les premières inquiétudes jusqu'à l'étrange vertige du succès. Il fait le récit de cette création et de cette lutte de deux années qui les aura conduits du squat au Festival d'Avignon. Ce livre revient sur la rencontre improbable entre deux univers - celui du théâtre et de ses feux, celui de la clandestinité et du combat pour sortir de l'ombre - et sur le parcours initiatique commun qui en a découlé. C'est un récit vivant sur les porosités de notre époque, les questionnements qu'elle précipite, la conversion du regard qu'elle exige plus que jamais de nous.