De l'engagement dans une époque obscure
Une époque obscure, c'est cette époque individualiste et économiste, qui voudrait nous faire croire que chacun de nous est « un petit entrepreneur de soi ». Or, ni le militant ni l'individu de bonne volonté, ne sont en mesure d'assumer les défis de l'époque... Les auteurs nous invitent à abandonner une vision « messianique » de l'engagement, impliquant la promesse d'un monde meilleur à venir, et qui n'a débouché que sur la désillusion et le repli sur soi. Ce qu'ils nous proposent, c'est l'engagement recherche, l'engagement immanent, expression d'un désir vital, qui revendique la lutte radicale, dans ce monde-ci.
Notre société préfère l'enseignement des statistiques et des expertises abstraites aux « savoirs des gens », les décisions politiques aux hypothèses pratiques du terrain... Et c'est ainsi que l'homme, de plus en plus déterritorialisé, se met en danger. Car nous croyons que l'homme n'est rien en soi, mais peut tout devenir (du moment que c'est économiquement utile), et que tout est possible à celui qui saura s'adapter : ces croyances produisent en réalité une grande impuissance !
Il faut donc récupérer les liens qui nous composent, retrouver nos racines et nos affinités, notre « commun » qui fait notre force, et non pas nos petites identités individuelles. Changer le monde, c'est retrouver en quoi nous le co-créons, au lieu de nous y adapter. Mobilisant des réflexions aussi diverses que celles de La Boétie, Marx, Foucault, Spinoza, Gramsci, s'appuyant sur des expériences politiques concrètes comme celle des Tupamaros uruguayens, puisant aussi bien ses métaphores explicatives dans le cinéma de David Lean que dans les « lieux communs » du langage quotidien, ce livre nous rappelle avec énergie et jubilation que nous sommes bel et bien engagés !