La diplomatie de connivence
Depuis la chute du Mur de Berlin, le système international est devenu une sorte d’énigme, que les spécialistes peinent à décrypter et qualifier. Vit-on désormais dans un monde « post-bipolaire » - selon une catégorie héritée du passé -, « unipolaire » - ce que dément l’impuissance américaine - ou « multipolaire » - alors que les puissances moyennes démontrent une faible attractivité ?
Derrière ce flou terminologique se dissimule une continuité profonde : la prétention des plus « grands », formalisée à partir de 1815 à travers une « diplomatie de concert », à se partager le pilotage du monde. On retrouve aujourd’hui cet entêtement oligarchique dans les nouveaux « directoires du monde » que seraient le G8 puis le G20, qui renouvellent pourtant les blocages.
S’autolégitimant autour de notions telles que l’« Occident » et la « démocratie », la « diplomatie de connivence » - telle que Bertrand Badie la qualifie - conduit à des conflits (Afghanistan, Irak) qui ensuite lui échappent. Figée dans un fonctionnement d’exclusion, elle suscite la contestation d’États (Iran, Venezuela), d’opinions publiques et d’acteurs - parfois armés - frustrés d’être écartés de la prise de décision. Limitées dans ses performances et protectrice de ses privilèges, elle met en scène la volonté de résoudre de grandes crises, comme celles affectant l’économie mondiale, sans parvenir à des réformes concrètes. Phénix médiocre qui renaît toujours de ses cendres, la « diplomatie de connivence » est examinée ici dans son histoire, ses fonctions, et ses échecs. Bonne manière d’explorer aussi la notion obscure de « système international ».