GENOCIDE DES ARMENIENS
Le 24 avril 1915, sous couvert de la guerre, les comités unionistes des Jeunes-Turcs gouvernant l'Empire ottoman déclenchent le génocide des Arméniens, la minorité religieuse la plus nombreuse et la plus fidèle, forte de 1,5 million de personnes. 800 000 d'entre elles sont exterminées en quelques mois, selon un processus très planifié : d'abord l'exécution des officiers et soldats arméniens de l'armée ottomane, puis l'élimination des notables, élites et intellectuels, ensuite la déportation des familles terrorisées par la disparition des proches vers les déserts syriens et, sur les routes de la déportation, un massacre systématique opéré par des populations turques, des tribus kurdes, des gendarmes ottomans et les tueurs de l'Organisation spéciale, enfin la concentration des survivants dans des camps et leur mise à mort. La victoire des Alliés n'empêche pas la poursuite du génocide en direction des survivants arméniens et des derniers assyro-chaldéens également exterminés.
Le nationalisme ethnique et la tyrannie politique des unionistes fondent l'anéantissement d'un peuple et sa complète éradication en Turquie. Bien que ce premier génocide de l'âge contemporain ait fonctionné comme un secret d'État, il a été rapidement documenté, comme l'ont été les répétitions générales des grands massacres de 1894-1896 et de 1909. En dépit de la reconnaissance d'un « crime contre l'humanité et la civilisation » par les Alliés et leur volonté de juger les coupables, les Arméniens disparaissent totalement de leur patrie historique. L'importance du premier génocide n'a pas été suffisamment connue ni comprise au xxe siècle. Faire son histoire éclaire l'effondrement de l'humanité lors de la Première Guerre mondiale et la nécessité d'une lutte déterminée contre la violence raciale, sociale et politique.