Watt
Lorsqu'il entre au service de monsieur Knott, Watt pénètre dans une demeure où règnent une stricte hiérarchie et une rigoureuse observance des horaires quotidiens. Nouvel arrivant, l'activité culinaire et ménagère de Watt se cantonnera d'abord au rez-de-chaussée où il obéira aux ordres de l'autre serviteur, un nommé Erskine alors promu au service rapproché de M. Knott sis au premier étage. Toute une lignée de serviteurs ont précédé Erskine et Watt, bien d'autres leur succéderont sans doute lorsque, de nouveau venu en nouveau venu, Watt aura pris la place d'Erskine puis achevé le cycle qui lui est imparti. Ce mécanisme séquentiel n'est pas pour déplaire à Watt qui, dans sa " quête d'une signification ", n'aime rien tant qu'avoir recours au déroulement strict d'une réflexion logique. Le moindre événement, une brève rencontre, la contemplation d'un mot, l'observation d'un objet, sont toujours pour lui des " incidents brillants de clarté formelle et au contenu impénétrable ". Voilà qui le propulse dans l'exploration exhaustive et la quantification de tous les possibles dont ces faits sont empreints. Il lui faut aller jusqu'à l'extrême limite de la combinatoire : épuiser tous les possibles, toutes les hypothèses envisageables et la probabilité de leurs contraires. Watt nous transporte ainsi constamment entre la réalité et les méandres captivants du monde virtuel qui la côtoie et la prolonge. Dans Watt Samuel Beckett crée avec humour et ironie un monde débordant de fantaisie loufoque, mais il nous offre aussi une fascinante réflexion sur les limites du langage, les errements de la logique et les frontières de la raison.