Nouvelles cantates
Après ma traduction des Fragments verticaux de Roberto Juarroz, je me mis à relire certains passages de la Bible, que j'avais marqués sur la marge, puis j'en soulignai d'autres, jusqu'à ce que, chronologiquement enfin, je transcrive les notations dans un cahier. Tout au long, je fus gouvernée, d'une part, par la nécessité de reprendre ce qui était à mes yeux le plus beau dans le message, et de l'autre, par celle de relever une écriture qui me frappait d'elle-même. Le fil que je tirais dévoilait une étrangeté que je recevais en partage et qui était comparable à celle qui apparaît dans tout grand ouvrage littéraire. En d'autres termes, je pouvais aussi bien être en train de parcourir Virgile, Dante, Montaigne, Beckett, ou de continuer à traduire Juarroz. J'eus, de plus, le sentiment que les récits du Livre s'inspiraient d'un autre volume mystérieux, antérieur, qui était la clef de la connaissance et de la vie : les tables et les lois, les livres scellés, mangés, ailés, les paroles à introduire dans la bouche, les doigts qui écrivent sur le sol s'essayaient, mystérieusement aussi, à le recopier. Quoi qu'il en fût, le contenu de ce volume premier était impérativement voué à se répéter et à s'accomplir dans les suivants. Cela me rappela le caractère visionnaire de la poésie ; autant que les répétitions qui s'affirment comme une vérité unique en particulier dans les quatre Evangiles, sont des caractéristiques propres à la littérature. A mesure que le fil éclaireur me guidait entre ces histoires et ces personnages, chargés de l'éclat de leur inébranlable et messianique destin, le voile de l'émotion se déchirait à cause de cette étrangeté, dont la fulguration mince, démunie, éminemment sainte de même, confirmait en quelque sorte le foyer. Paul disait : Toute Ecriture est inspirée de Dieu.