Signets : Essais critiques sur la poésie du XVIIIe au XXe siècle
D'un signet, le Larousse dit : "petit ruban attaché à la tranchefile d'un livre et qui sert à marquer l'endroit où l'on a interrompu la lecture." Les divers articles de ce volume s'apparentent aux moments où le livre interroge au point que le lecteur s'arrête pour méditer, rêver ou se reporter aux rayons de la bibliothèque, à cette différence près qu'ici une activité d'écriture et d'interprétation s'en est suivie. Une fois encore l'espace poétique m'a requis, de Chénier à Philippe Jaccottet, vaste pan temporel où s'est développée ce que nous appelons la poésie moderne. La plupart du temps, un "motif" se dessinait, insistant ou seulement composé de linéaments, bien différent d'un thème et plus en relation avec une expérience verbo-existentielle : le temps de Chénier, les monstres de Baudelaire, le rêve mallarméen, les nuits de Rimbaud et les armes de Char, le viatique de Jaccottet. En d'autres occasions, des modes de composition demandaient à être éclaircis : les écrits faussement testamentaires, les suites de Paul et Virginie, le regroupement par Nerval de ses poésies, l'épopée et le journal pratiqués par I. Ducasse, les Manifestes de Breton, l'écart de Reverdy et l'impossible représentation d'Artaud. Autant de "sujets" impliquant leur méthode (plutôt qu'une application de connaissances toutes faites) et forçant à se risquer dans une odyssée personnelle ou trans-individuelle. Une inédite configuration de la poésie s'en déduit, une nouvelle histoire où l'aventure rhétorique se complique des nécessités subjectives et des imprévisibles raisons à travers lesquelles des hommes, des écrivains, ont choisi de se vivre.