Relais : Dix études réunies en hommage à Georges Blin
“L’agent voyer”, c’est le mot qu’emploie Georges Blin pour définir le critique, comme celui qui guide et renseigne, qui “souligne la route”, et “remet sur la voie” le lecteur s’il dévie du droit chemin et s’écarte de la bonne direction, celle qui pointe dans une oeuvre “l’organisation centrale du but”. Il nous prévient, il nous escorte, il nous convoie à travers tout terrain. Modeste et demeurant à sa place : Georges Blin le met en garde contre l’illusion de se prendre pour l’auteur, ou le héros, la tentation de confondre sa voix avec la tonalité de l’oeuvre, l’ambition du mimétisme ou de la rivalité ; ou celle d’ériger la critique en création : “ombre de l’écrivain”, soit, mais pas au point que l’ombre “soit plus longue que l’homme, car nous serions à l’heure où le soleil est bas”. Les années cinquante furent pour l’illustration et la compréhension de la littérature des années de renouvellement et de fondation : ce volume de célébration de Georges Blin réunit un certain nombre de ceux qui participèrent à ce grand moment et qui pouvaient voir en lui d’une certaine manière un prédécesseur. Outre Michel Crouzet qui fut à l’initiale de cet hommage, ont participé Yves Bonnefoy, Jean-Pierre Richard, Patrick Labarthe, Jacques Bersani, Arnoldo Pizzoruzzo, Michel Raimond, Jean Starobinski, Marc Fumaroli. Ce volume reflète ainsi le questionnement de Georges Blin sur le rôle de la critique. Au nom du mouvement et de l’unité, il fut le premier à s’opposer aux oppositions radicales et aux postulats d’incompatibilité : comme contraires aux conditions de toute critique. Pas de Modernes sans Anciens, pas de révolution sans tradition, pas d’oeuvre sans homme, pas de narrateur sans auteur, pas d’étude du comment sans saisie du pourquoi, pas de causalité sans finalité ; pas de forme sans fond.