La pensée dérobée
"Je pense comme une fille enlève sa robe." (Bataille.) La pensée est une mise à nu et la nudité est inachevable : elle n'est pas un état, elle est un mouvement incessant pour se porter à l'extrémité à laquelle n'atteint que ce qui se dérobe encore en atteignant l'extrémité. Mais le dénudement touche aussi au dénuement : aujourd'hui, la pensée doit répondre d'une détresse du monde et d'un souci de l'histoire qui défient toutes nos philosophies, nos religions, nos représentations. Comment penser, comment recommencer à penser dans la nudité : à partir de rien de donné, en vue de rien de capitalisable ? Pas de "salut", pas de "fin", mais à chaque instant, au contraire, une ouverture singulière du sens d'être sans fin. Cela définit d'abord la pensée - le dénudement - comme une conduite, une tenue et une allure : un ethos autant qu'une techné.