Cuba : En attendant l'année prochaine
Plus que je me rendais à Cuba et moins j'entendais quelque chose au pays. Une fois passé de l'autre côté du miroir tropical et de ses riants reflets exotiques, je pénétrais dans un monde où soudain la logique et l'ordre naturel des choses n'avaient plus cours. Une contradiction chassait une incohérence, les comportements de ses gens s'y montraient imprévisibles, ce pays vivait comme un funambule sur le fil de règles déconcertantes. Puis, avec le temps, j'ai compris ce qui se passait. Les Cubains ne font pas autre chose que n'importe quelle autre société prise dans une situation aussi instable qu'intenable : ils s'adaptent. A l'impondérable, à l'aléatoire, au relatif. Aux versatiles lois qui gouvernent leur quotidien comme aux énigmatiques volontés commandant les flux de l'eau et de l'électricité, par exemple. Les Cubains sont ainsi devenus les champions du monde de l'équilibrisme - qu'il soit alimentaire ou politique. Avec, en guise de vital balancier, un humour en acier trempé. Comment peut©on être Cubain aujourd'hui ? J'y suis allé voir, le plus près que je pouvais, de La Havane jusqu'au fin fond du pays. J'ai tout rencontré, sauf ce à quoi je m'attendais. C'est tout le charme de ce pays et pourquoi j'y retourne - ou j'espère y retourner - aussi souvent que je peux.