Peau d'âme
Peau d'âme est sans doute l'œuvre la plus énigmatique, la plus méconnue de Catherine Pozzi (1882-1934). Poème, conte, traité de science et de philosophie, c'est un texte déroutant qui résiste aux classements convenus. Par sa construction fragmentaire pleine de ruptures et de trous, l'ouvrage pourrait passer à première vue pour une ébauche. Or, il n'en est rien. Peau d'âme est le fruit d'une vie vouée à la méditation philosophique, scientifique et poétique. Elle témoigne de vingt ans de recherches formelles. Comme plusieurs écrivains novateurs de l'époque – Rilke, Woolf, Joyce, Gertrude Stein –, Catherine Pozzi expose ce qu'elle appelle le "scandale" que constitue la conscience : comment l'esprit parvient-il à percevoir un monde qui est d'une autre nature ? C'est un problème classique en philosophie que nombre de penseurs contemporains s'évertuent à élucider, dont Bergson et William James. Cependant, Catherine Pozzi, qui connaissait à fond les idées de ces derniers, refuse d'utiliser leur langage discursif ; elle place son enquête sur un registre résolument littéraire, cherchant à inventer une parole originale, personnelle, capable de restituer au monde toute son étrangeté.