Presque un frère
Les Terrains, c'est comme une presqu'île sur le point de se détacher, mais qu'un quart d'heure d'autoroute relié encore au continent, et comme une prison où chacun expierait une faute que personne n'aurait commise. Ainsi du Troupeau, choeur de jeunes garçons soudés les uns aux autres, qui déambule, piétine et court des toits aux sous-sols, cherchant jusqu'au bord du vide le corps à corps avec le gardien des lieux. Les autres ? Pascal, le poète métis et bègue, s'est retranché dans sa chambre et voué aux mots. Lydia s'est enfuie. E'dy, le garçon du bloc d'à côté, est revenu enquêter sur la blessure originelle qui a ruiné sa propre tentative d'" évasion ". Sabrina, qui se dit " sa soeur tout entière à cause du sexe ", révèle un visage d'écorchée dans la furtive vérité des étreintes. Survient Bruno : voyeur, bâtard, ce fils des beaux quartiers reconnaît de l'intérieur le malaise de ceux des Terrains. Presque un frère. Habités par la rage ou le désespoir, portés par une langue très contemporaine qui réinvente, au temps présent, une véritable scène tragique, les personnages de Tassadit Imache vivent, à fleur de nerfs et dans l'urgence, ce moment périlleux où, juste avant l'affrontement, vie et mort peuvent encore se séduire.