Yôko Ogawa, coffret 3 volumes : La Piscine - Les Abeilles - La Grossesse
La piscine
Il en est de la narratrice, ici, comme de quelqu'un à qui jour après jour on volerait son enfance : ses parents dirigent un orphelinat, et il lui faut vivre la même vie collective et morne que ses camarades de l'institution. Une grisaille éclairée toutefois par la présence de Jun, le bel adolescent qu'elle aime tant contempler, à la piscine. Et par celle de Rie, une petite fille, son souffre-douleur, qu'elle tourmente à plaisir. Première traduction en France d'une jeune romancière japonaise, la Piscine explore avec une saisissante indiscrétion les pulsions les plus troubles. Yôko Ogawa trouve les mots justes pour dépeindre l'adolescence, univers d'une perversité innocente où frustration, désir, recherche de la pureté, cruauté ou satisfaction peuvent à chaque instant advenir, en deçà de toute morale, et infléchir un destin, pour le meilleur ou pour le pire...
Les abeilles
Pour rendre service à son cousin qui cherche une chambre, l'héroïne l'a introduit dans le foyer d'étudiants où elle-même séjourna jadis. Mais sitôt le jeune homme installé, un malaise inexplicable s'empare d'elle. Dans les semaines qui suivent, à chaque visite qu'elle tente, son cousin demeure introuvable. Et le directeur du foyer se montre toujours plus évasif, plus inquiétant, plus équivoque. Yôko Ogawa, par petites touches aussi subtiles qu'obsédantes, met en place un climat angoissant qui prend littéralement possession du lecteur. Ce bref roman, écrit d'une plume délicate, est en effet lourd des pires présomptions.
La grossesse
Depuis le début de la grossesse de sa sueur, la narratrice consigne dans un journal les moindres transformations physiques de la future mère. Et quand celle-ci, passé la période des nausées, retrouve un appétit vorace, elle s'empresse de lui préparer des marmelades de pamplemousses, dont elle la régale et la gave à plaisir. Peu à peu la peau - peut-être toxique - et la chair des fruits viennent se mêler, dans son esprit, à l'effervescence mystérieuse de la "matière" en gestation... Avec un rare talent, Yôko Ogawa pousse jusqu'à l'obsession, ce désir nourricier irrépressible dont le lecteur, jusqu'à la fin, ne peut que pressentir les conséquences. Par quelques allusions, elle maintient ce récit entre ironie et cruauté, au bord d'un abîme où la vie menace d'engendrer la mort.