Paysage aux trois arbres
Pendant la guerre du Golfe, une vieille dame meurt à la suite d'un incendie qui s'est déclaré dans la cage d'escalier d'un immeuble de Tel-Aviv. S'agit-il vraiment d'un accident ? Sur un canevas discrètement policier, Yehoshua Kenaz fait apparaître, en les concentrant de manière saisissante, tous les motifs de la problématique modernité de Tel-Aviv. Au fil de rapports de voisinage que gangrènent à la fois le spectre de la délation et la suspicion endémique qui règne entre juifs et Arabes, un immeuble devient la scène de l'affrontement entre générations et communautés diverses. Comme ciselé en abîme dans le premier, le deuxième récit remonte le temps : à l'époque du mandat britannique, deux familles, l'une ashkénaze, l'autre sépharade, partagent un espace exigu et saturé auquel fait écho une gravure de Rembrandt qu'un soldat anglais s'applique à reproduire pour passer le temps. A la fois visibles et illisibles, l'espace pictural et l'espace de vie, enchevêtrés, se répondent dans un vertige qui superpose les lieux et le temps, la pointe précise du graveur et celle de l'écrivain.
Dans ces deux récits mettant en scène de petites gens que les circonstances contraignent à vivre ensemble, Yehoshua Kenaz fait montre d'une lucidité teintée d'humour et de compassion qui confère à ses personnages une troublante et exemplaire profondeur