Les identités remarquables
A plus bé au carré égale a-deux plus bé-deux plus deux a-bé…
Les identités remarquables, c’est une musique. Je ne sais pas à quoi ce modèle mathématique peut bien servir, mais j’aime le réciter par cœur. Comme certains passages du Panégyrique de saint Bernard de Bossuet : “Bernard, que prétends-tu dans le monde ? Y vois-tu quelque chose qui te satisfasse ?… Bernard, Bernard, cette verte jeunesse ne durera pas toujours : cette heure fatale viendra qui tranchera toutes les espérances trompeuses par une irrévocable sentence.” Ou certains vers de “Zone” pris dans Alcools d’Apollinaire : “Maintenant tu marches dans Paris tout seul parmi la foule / Des troupeaux d’autobus mugissants près de toi roulent / L’angoisse de l’amour te serre le gosier / Comme si tu ne devais jamais plus être aimé.”
Il y a dans l’apostrophe à la deuxième personne du singulier une sonorité et un mystère qui me plaisent bien. Surtout pour parler d’amour et rappeler aux hommes qu’ils viennent dans le monde pour en sortir bientôt. Qui parle ? D’où parle-t-il ? Musique et devinette : c’est la mise à feu du roman.
Un homme se réveille, un joli jour de mai 2005 dans une ville française établie sur la côte atlantique, une voix dit : “Tu vas mourir, aujourd’hui, et tu ne le sais pas encore.” Du matin jusqu’au soir, une journée va s’écouler pour que le lecteur comprenne. A travers les mots et les gestes des autres personnages du roman, les choses vont s’éclairer peu à peu : un ami philosophe, une petite marchande de jouets aimée et négligée, une vierge aux passions froides, une banquière aux yeux de biche, un tueur prédestiné.