Les mamiwatas
Réfugié dans sa villa alors qu'une insurrection enflamme le Cameroun, Mister Mike (Marc, de son prénom d'origine), spectateur demi-souriant de ses propres déboires, contemple les yeux dans les yeux sa fulgurante épopée amoureuse et professionnelle de Blanc en Afrique. Depuis bientôt deux ans en poste à Buea, dans une des provinces les plus anglophones du pays, ce cinquantenaire baroudeur, "authentique conquérant tout à fait vert encore", s'est vu confier la direction d'une Alliance française en pleine déshérence. Sans états d'âme superflus, il a bravé réalité hostile et vents contraires, affronté tous les complots, incarné avec lucidité ce symbole terni d'une présence française passablement détestée et déliquescente. Et en homme sûr de ses pouvoirs, Mike a goûté à la nuit africaine, savouré sans innocence des charmes délicieux. Jusqu'au jour où Gloria - très jolie, très vide, résolument avide - a brouillé ses plus solides repères : les mamiwatas (les sorcières de la mer) ont l'art d'envoûter ceux qui n'ont pas peur du vertige. Les Mamiwatas un grand roman d'amour politique d'une honnêteté et d'une liberté intellectuelles rares. Avec un souffle narratif puissant, porté par une phrase d'une ampleur fluviale, Marc Trillard invente une autofiction hors-les-murs, qui dit les illusions, mais aussi les ambiguïtés, la violence, l'impossible expiation du passé - et tous les déchirements que met en œuvre la fréquentation postcoloniale de l'irréconciliable étranger.