La pluie sur les carreaux dessine des fantômes
Ce livre étonnera. Son auteur est bien connu comme romancier, essayiste et pamphlétaire, mais qui le savait poète ? Pourtant, dans sa jeunesse, il a, de son
propre aveu, écrit et déchiré des poèmes. La poésie est pareille à une drogue : difficile de s'en défaire quand on y a goûté. Tillinac en apporte ici la preuve.
Ce Corrézien doublé d'un germano-pratin cosmopolite, héritier des " Hussards ", ami d'Antoine Blondin et de Michel Déon, a toujours été - et reste - un homme libre, dans la vie et dans ses livres : le poète ne peut se concevoir autrement. De plus, Tillinac a le goût du bonheur dont il se fait le prosélyte. Quand il écrit : " Soyez inactuels ", " Évadez-vous " " Soyez insoucieux ", " Lâchez vos désirs ", il fait plutôt songer à Rimbaud ou à Breton qu'à un essayiste à la mode. Le titre du recueil qu'on va lire est la fin du premier poème intitulé Route de l'Est : il évoque la rencontre avec une fille dans une auberge près d'une écluse. Simple, direct, d'un lyrisme dépouillé, mais non dénué de tendresse, il est à l'image de la poésie de Tillinac, la moins intellectuelle, la moins apprêtée qui soit. Elle sonne juste et vrai. C'est que la poésie ne triche pas.