Tribu
Sous la plume de Carine, fille de Serge, la saga des Reggiani ressemble furieusement à une « comédie à italienne », à un film de Dino Risi qui pourrait s'intituler "Amours, drames et parmesan". Car, quand Carine Reggiani se ballade sur le chemin de ses souvenirs, de son enfance à aujourd'hui, ce n'est pas seulement sa propre vie qu'elle revisite, c'est aussi dans l'histoire de toute sa tribu qu'elle replonge.
Autant dire dans une alternance de bonheurs et de malheurs, de joies et de peines. On rit, on pleure. On rit quand Ferrucho Reggiani, antifasciste italien installé barbier dans le faubourg Saint-Denis, essaie de se faire passer pour un ancien champion automobile auprès de sa clientèle parisienne. On se gausse quand le fils de Ferrucho, Serge, alors comédien débutant, dégonfle les pneus du vélo d'une fille pour la draguer : malgré cette mauvaise blague, elle va l'épouser et devenir la mère de Carine ! On pleure de rire quand, dans la rue, désormais connu et célèbre, le même Serge Reggiani se fait passer pour son frère Paul… un frère qui n'existe pas.
On pleure doucement avec Carine quand le chagrin la brise : elle n'a pas dix ans, ses parents viennent de se séparer… On est vraiment secoué quand son frère aîné, Stephan, se suicide et quand leur père, Serge, inconsolable, se noie dans l'alcool. On enrage quand Yves Montand, à la sortie de Bobino, gifle Simone Signoret parce qu'elle a trouvé le tour de chant de Serge Reggiani « formidable ». Mais c'est une larme de joie qu'on essuie quand le père et la fille, Serge et Karine Reggiani, partent en tournée main dans la main pour chanter ensemble sur les scènes du monde… Comediente ! Tragediente ! On rit et on pleure beaucoup en lisant La Tribu .
On vit toujours comme ça chez les saltimbanques ? En tout cas, c'est ainsi qu'on vit chez les Reggiani.