Histoire de chambres
Bien des chemins mènent à la chambre : sommeil, naissance, amour, maladie, méditation, Dieu, sexe, lecture et écriture, quête de soi, réclusion… et jusqu’à la mort. De l’accouchement à l’agonie, elle est le théâtre de l’existence, ou du moins ses coulisses, celles où, le masque dépouillé, le corps s’abandonne aux émotions, aux chagrins, à la volupté. On y passe près de la moitié de sa vie, la plus charnelle, la plus assoupie, la plus nocturne, celle de l’insomnie, des pensées vagabondes, du rêve, fenêtre sur l’inconscient (sinon sur l’au-delà) ; et ce clair-obscur renforce son attrait. Dans un livre exceptionnel Michelle Perrot fait défiler une dizaine de portraits de chambres, saisies dans leurs dimensions historiques : la chambre du roi Louis XIV à Versailles, la chambre d’hôtel, du garni au Palace, la chambre commune, la chambre conjugale, la chambre d’enfant et celle de la jeune fille, celle des domestiques ou du malade et du mourant. Les diverses formes de chambres solitaires ne sont pas absentes non plus : la cellule du religieux, celle de la prison ; la chambre de l’étudiant, celle de l’écrivain. Elle donne ainsi la parole au continent le plus privé de l’existence humaine, faisant ressurgir des émotions et des sentiments universels, érigés avec délicatesse et acuité en objet historique. Une oeuvre majeure.