Du sang sur les lianes : Léopold II et son Congo
En 1893, le kilo de caoutchouc récolté dans la forêt équatoriale du Congo valait 6 francs-or ; en dix ans, l'essor de l'automobile doubla ce prix. Le caoutchouc se trouvait, sous forme de lianes, dans de vastes territoires d'un Congo qui n'était pas encore le Congo belge. La saignée des lianes à caoutchouc pour la récolte du latex était un calvaire pour les indigènes. Ceux qui se dérobaient à cet impôt sanglant pouvaient être mis à mort, et ils le savaient.
Leurs femmes prises en otage étaient souvent vouées à la famine. On coupait les mains des hommes victimes de la répression pour prouver aux supérieurs hiérarchiques qu'on les avait tués. Le bassin du Congo est plongé dans le sang.
Léopold II, le 4 avril 1892, écrivait au gouverneur général du Congo Whis : "Il importe d'achever le développement bien nécessaire de nos récoltes d'ivoire et de caoutchouc. L'Etat ne peut maintenir son existence qu'au moyen de très larges et très fructueuses récoltes." Les ordres royaux furent exécutés à la lettre. De 1900 à 1908, l'Etat indépendant du Congo, propriété personnelle du deuxième roi des Belges, exporta en moyenne 5000 tonnes de caoutchoux par an... Ce livre détaille à quel prix pour les populations locales.
Daniel Vangroenweghe est un chercheur belge qui, pour reconstituer la vérité de cette aventure controversée, a passé quatre années dans les régions équatoriales du Congo, là où, à près de cent ans de distance, la menace de mort se dit encore : "Tu iras au caoutchouc ! ".
En plein été de 1908, peu avant la mort de Léopold II, le chauffage central du palais de Bruxelles tourna nuit et jour tout au long d’une semaine. Le monarque brûlait ses papiers. Il déclara : "Ils auront mon Congo mais ils n’auront pas ce que j’y ai fait."