Conversations avec Keith Richards
Ma première rencontre avec Keith Richards, j'entends pour l'âge adulte, remonte à1983 : à Marseille, dans l'auvent d'un bouquiniste, l'achat d'un livre illustré sur la vie des Rolling Stones. Un orage fondait sur moi : oui, le rebelle qui à lui seul incarnait tout le rock avait chanté des alleluiah devant la Reine et probablement, sans cela, ne se serait-il jamais formé l'oreille. L'histoire des Rolling Stones : des morts sous la musique (Brian Jones, Gram Parsons, Meredith Hunter, Ian Stewart), beaucoup d'argent, et ce qui s'écrit par eux de l'histoire de la télévision, de la formation du concept de culture...
Pendant des années, j'acquiers systématiquement tout ouvrage ou document se rapportant à leur histoire. De1996 à 2002, je m'embarque dans l'écriture des1000 pages de Rolling Stones, une biographie...
Ces dix ans, un événement considérable : Keith Richards a pris deux ans de sa vie pour rédiger son autobiographie, Life. Le paradoxe est le suivant : une oeuvre musicale considérable, celle du groupe, albums officiels, enregistrements détournés des studios, histoire des concerts. Une expérience de vie à la foix extrême et excessive. Et pas forcément les mots pour la dire, puisqu'on n'est jamais qu'un bluesman.
Et nous, qui continuons nos petites routes ordinaires, nos bouquins, qu'est-ce qu'on leur a pris, aux grands frères qui se brûlaient les ailes, tout devant ? Qu'avons-nous à déchiffrer, pour nous-mêmes, de leur propre expérience ? Est-ce que ça s'appelle solitude, absence, inquiétude, comme pour nous autres ? Comment expriment-ils le risque, comment vivent-ils l'abîme de cette disproportion des concerts gigantesques ?
Voilà comment a commencé l'histoire de ces quatorze Conversations avec Keith Richards. FB