Il faut beaucoup aimer les hommes
Une femme rencontre un homme. Coup de foudre. Il se trouve que l'homme est noir. "C'est quoi, un noir ? Et d'abord, c'est de quelle couleur ?" la question que pose Jean Genet dans "les nègres", cette femme va y être confrontée comme par surprise. Et c'est quoi, l'Afrique ? Elle essaie de se renseigner. Elle lit, elle pose des questions. C'est la Solange du dernier roman de Marie Darrieussecq, "Clèves", elle a fait du chemin depuis son village natal, dans sa "tribu" à elle, ou tout le monde était blanc.
Le roman réserve d'ailleurs quelques surprises aux lecteurs de "Clèves", même s'il n'est pas nécessaire De l'avoir lu pour entrer dans cette nouvelle histoire. L'homme qu'elle aime est habite par une grande idée : il veut tourner un film adapte de "au coeur des Ténèbres" de Conrad, sur place, au Congo. Solange va le suivre dans cette aventure, jusqu'au bout du Monde : à la frontière du Cameroun et de la Guinée équatoriale, au bord du fleuve Ntem, dans une sorte De "je ntem moi non plus".
La forêt vierge est très présente dans toute cette deuxième partie du roman, Qui se passe en pirogue et en 4x4 au milieu des pygmées et des bûcherons clandestins, sous l'oeil d'une Solange qui se sent négligée. Depuis "truismes" en passant par "le bébé" ou "Tom est mort" jusqu'a "Clèves", les romans de marie Darrieussecq travaillent les stéréotypes : ce qu'on attend d'une femme, par exemple ; ou les phrases toutes faites autour du deuil, de la maternité, de la virginité. Dans "il faut beaucoup aimer les hommes" cet homme noir et cette femme blanche se débattent dans l'avalanche de cliches qui entoure les couples qu'on dit "mixtes".
Le roman se passe aussi dans les milieux du cinéma, et sur les lieux d'un tournage Chaotique, peut-être parce qu'on demande a un homme noir de jouer un certain rôle : d'être noir. Et on demande a une femme de se comporter de telle ou telle façon : d'être une femme.
Le titre est tiré d'une phrase de Marguerite Duras qui sert d'exergue : "il faut beaucoup aimer les Hommes. Beaucoup, beaucoup. Beaucoup les aimer pour les aimer. Sans cela, ce n'est pas possible, on ne peut pas les supporter."