Hors gel
« Je ne voulais pas admettre que guérir Clémence signifiait l’éteindre. Pas plus que nos parents, je ne saurais jamais ce qui chez elle nous attirait, nous repoussait. Je ne voulais pas le savoir. »
Hors gel est un roman de légère anticipation, au coeur d’un drame familial déchirant, et dans un pays soumis à une stricte écologie politique, où la nature, après des années de consommation pendant lesquelles elle est devenue un produit, est désormais déifiée, ultra-protégée, et en apparence contrôlée. En apparence seulement.
Dans une vallée d’altitude, pendant l’été 2056, une sirène sonne, réactivant une peur ancienne. Au-dessus du village, dans le ventre du glacier, une poche d’eau sous pression menace de se rompre. Peu de temps auparavant, Clémence, disparue depuis des années, a appelé sa soeur jumelle, Lucie, pour lui demander de la cacher dans la grange familiale isolée qu’elle habite, juste en dessous du glacier.
Hors gel, c’est le roman de ces deux peurs : la peur ancestrale et collective de la catastrophe que pourrait provoquer la rupture du glacier, et la peur plus intime, familiale, de Lucie vis-à-vis de sa soeur jumelle, Clémence, revenue après trois décennies de disparition, dans l’espoir, dit-elle, d’échapper à un réseau de prostitution et de trafiquants de drogue, dont on n’est pas sûr qu’il existe réellement. La peur de la lave torrentielle s’appuie sur le souvenir d’une catastrophe qui, il y a plus de 150 ans, avait ravagé la vallée. La peur de la soeur est aussi ancrée depuis longtemps dans la mémoire profonde de Lucie qui n’a de cesse d’essayer de comprendre cette soeur qui la malmène et l’obsède. L’extrême sensibilité de Clémence a fait d’elle une enfant, puis une femme « invivable ». Elle est violente, toxicomane, délinquante, fugueuse, asociale, psychotique. Leur mère joue aussi un rôle dans cette histoire. Sénile, elle est là sans être là, et a, semble-t-il, oublié qu’elle a une deuxième fille, née quelques heures après la première, et qu’elle a tout tenté pour essayer d’endiguer sa violence et sa souffrance. En vain. Clémence n’a qu’une idée en tête, alors : se sauver au risque de devoir affronter le cataclysme.