La Marche du canard sans tête
Iegor Gran n'en démord pas, la crise sanitaire pandémique fait ressortir tous nos défauts, toutes nos superstitions, toutes nos faiblesses et lâchetés. Après un premier état des lieux féroce et hilarant dans Ces casseroles qui applaudissent aux fenêtres en septembre 2020, l'auteur récidive en s'attaquant dans ce nouveau texte à l'impéritie du pouvoir politique. Il décrit drôlement l'improvisation érigée en règle de gouvernement. Séquence tragi-comique d'un déconfinement raté suivi d'un reconfinement à reculons. Les commerçants sont alors désignés comme les boucs émissaires d'une crise qui échappe au contrôle des pouvoirs publics. « Peu importe qu'aucune preuve n'existe d'une plus grande circulation du virus chez les fleuristes, les libraires ou les marchands de jouets que dans les couloirs ou les bureaux des grandes entreprises, écrit Iegor Gran. Peu importe qu'aucun cluster n'ait été mis en évidence chez un cordonnier ou un antiquaire, contrairement au Sénat ou à l'Assemblée nationale. » La librairie devra fermer mais l'usine de pneus, elle, pourra continuer de tourner. On en appelle à la raison en prenant les plus folles des décisions, et le tout à marche forcée, au mépris souvent des libertés fondamentales de chacun, dans un désordre ridicule, comme la marche d'un canard sans tête.