Orphée errant
Quand la poésie, et l'art avec elle, se prennent pour fin, ils tuent en réalité une relation plus organique : celle de l'Homme à la Source, unique, de toute vie. Ainsi dans le mythe d'Orphée - qui ne devait pas se retourner - Eurydice représente, hors toute péripétie sentimentale, l'aspiration la plus haute d'Orphée (et de tout homme) à être vitalement relié à la Source unique. Mais n'y parvenant pas. En rompant en effet avec cette relation. Orphée rompt en même temps avec ce principe d'unité qui se manifeste, chez l'artiste, par une toujours plus grande concentration. En fait, ce qui hante Haldas, est bien cette infidélité première qui fait d'Orphée un errant. L'art n'est que magie. Orphée, dans le mythe de Jason, ne tue pas le Dragon (le mal). Il l'endort seulement. Par son chant. La vraie relation à la Source, elle, n'endort pas le mal. Elle le tue. On pourrait dire dès lors qu'à travers sa détresse, consécutive à la faute (l'infidélité), Haldas cherche à passer de la sphère magique de l'art - la poésie - à celle de la réalité religieuse. En d'autres termes, de la magie séductrice d'Orphée à la réalité salvatrice du Christ. Dont le propre, en effet, n'est pas d'endormir ou d'enchanter le mal, mais de nous en guérir... De cette guérison qui n'est autre que le Paradis retrouvé. Ce qui, dans le langage d'Haldas, se traduit par : passer de l'Etat de Poésie à cet autre état qu'il appelle, non de "grâce" (qui fait institution), mais Etat Résurrectionnel.