L'Homme de cendre
Afin de conjurer l’arrêt de mort qu’une femme, en le quittant, a lancé contre lui, Simon tiendra scrupuleusement, pendant près d’une année, le registre muet de ses rencontres, de ses engouements, de ses rêves, de ses angoisses. Jour après jour, dans les lieux les plus divers, les circonstances les plus inattendues, il écrira le journal de sa vie, dans l’espoir, sans doute trompeur, de se sauver.
Mais qui est l’homme de cendre ?
Il partage son temps entre un Musée d’art moderne, pour lequel il organise des expositions itinérantes (Hodler, une rétrospective des « Nouveaux Sauvages », Manet) et sa passion jalouse de la musique. Mais sa vie, comme celle de chacun d’entre nous, est ailleurs : elle est faite de visages entrevus et de voix murmurées, de gestes inaccomplis et d’émotions furtives : c’est un tissu serré d’images et de musique, qu’il est vain de vouloir mettre en ordre.
Comme les notes d’une gamme, les femmes qu’il côtoie, dans son voyage sentimental, sont au nombre de sept, marquées chacune du sceau de la musqiue : il y a Solange, la blonde choriste de l’Église russe, Réjane, la journaliste soupçonneuse, Minna, sa correspondantes new-yorkaise, Donatienne, une comédienne sans emploi, Fanny, son amie d’Avignon, Laetitia, une écolière délurée, et Sybille, une dirigeante féministe dont l’ombre plane, comme une menace, sur la vie de Simon.
Chacune à sa manière donne un ton à sa vie : tantôt léger et ironique, tantôt funèbre et indécis, tantôt allègre et triomphant. D’une femme l’autre, dans une tonalité toujours changeante, Simon fait l’expérience d’une longue traversée du désir, lequel renaît sans cesse ailleurs, toujours à son insu, des cendres d’un ancien amour.
L’homme de cendre ?
–C’est ce qu’il reste de Simon, tandis qu’il commence son journal, au soir du 18 mars, dans l’après-coup du désastre amoureux.