Visages. Du masque grec à la greffe du visage
Ontologiquement emblème de l'humain, le visage est cette irréductibilité absolue avec laquelle on ne saurait transiger. On peut en effet dire qu'il est expérience originaire, objet de séduction et espace de projection fantasmatique. Sujet de malentendus, il se voit de surcroît travaillé de l'intérieur par mythes païens et chrétiens, allégories et contes qui ont imprégné les consciences et les imaginaires. Mais davantage encore, de la codification des émotions au formatage idéologique des visages, via les expériences extrêmes de la défiguration ou de la greffe chirurgicale, il apparaît que, loin d'être une expérience innée et transhistorique à postulat universel, le visage serait à penser de part en part comme une construction symbolique et culturelle. D'où deux voies de recherche : d'une part, montrer que le visage est une invention récente dans l'histoire de l'Occident. D'autre part, prendre la mesure de la blessure que le xxe' siècle, plus que tout autre, aura infligé à la visagéité. Le visage est, aujourd'hui, redevenu énigme, quand il n'est pas place manquante au cœur de la figuration. Ainsi, c'est à effectuer des traversées dans les époques - Grèce ancienne, Moyen Âge, Renaissance italienne, Xixe siècle, extrême contemporain -, dans les champs du savoir et dans les différents arts visuels que l'auteure s'est essayée, analysant plus particulièrement ces moments de doute et de terreur où l'Histoire et l'art ont mis en crise la visagéité.