Les ronces
Au début des années 80, un jeune instituteur est nommé dans un village moribond du Haut Languedoc. L'école ne compte plus que onze élèves, la vallée alentour se désertifie, les terres sont en jachère et les seules maisons rénovées le sont pour les vacances. Etranger au village, il est en butte à la méfiance des habitants, issus de ce pays depuis toujours. Il est surtout jeune, et ne correspond pas à la figure de l'instituteur classique, en blouse grise, incollable en participes passés et en conjugaison. Surtout, le nouveau maître aime se promener avec ses élèves sur les collines, plus qu'à les tenir enfermés dans la salle de classe. Grand arpenteur, l'instituteur va, année après année, prendre possession de ce monde miniature, fermé sur lui-même, figé dans un ordre ancestral archaïque, alors que le monde moderne semble aux habitants de la vallée un chaos dont il faut se protéger. Le roman se construit autour d'une série de portraits des habitants du village, hauts en couleur : le maire tout dévoué à la cause des pompiers et des sapeurs forestiers. L'ancien entrepreneur, qui toute sa vie a voté communiste pour finir dans les rangs du mouvement Chasse, Pêche, Nature et Traditions. La tribu des hippies, réfugiée sur les collines. Gégé, l'ancien gendarme revenu mourir au pays. L'agonie d'une vieille dame, arrachée à l'hôpital pour mourir entourée des siens... Rivalités de conseils municipaux, histoires de chasse, plaintes de parents : une sorte de comédie humaine se construit peu à peu, sous le regard de l'instituteur, un doux rêveur comme il se décrit lui-même, qui trouve, dans l'immobilité et le silence de cette vallée, le refuge nécessaire à l'écriture. Seule la lumière des écrans télés semble tenir en éveil ce monde qui sombre, un monde encore soumis aux rythmes des saisons et de l'ouverture de la chasse. Avec la suppression définitive du certificat d'études, la fermeture de l'école, l'entrée de deux femmes au conseil municipal, le village semble définitivement entré en glaciation. Il ne reste plus qu'à l'instituteur, sept ans après son arrivée, à choisir, sur une carte, le lieu de sa prochaine affectation.