Vie et Mort dans les Balkans
"À cette époque, la vie au Kosovo était loin d'être facile, et surtout pleine de dangers. C'est pourquoi, peu après leur arrivée, et pour être plus nombreux, mon père et ma mère firent venir du Monténégro leurs parents, leurs frères et sueurs et d'autres proches, de sorte qu'au moment de ma naissance en 1929, il y avait trente-trois adultes des deux familles, Tomaševic et Rajkovic, vivant au Kosovo. Ce qui représentait, disaient-ils, trente-trois fusils et trois fois plus de pistolets.
Comme les autres colons, mon père pensait que toutes les terres du Kosovo appartenant à des Albanais devaient leur être prises pour être données aux Serbes et aux Monténégrins, en raison du droit sacré des Serbes à ce territoire. Il se lança à corps perdu dans la campagne de repeuplement de la province, écrivant des lettres à ses parents et à ses amis partout au Monténégro. Il mentionnait la surface de terre arable que chaque famille pourrait posséder et parlait aussi des prêts bancaires à des taux préférentiels pour la construction d'une maison, l'achat de bétail, de chevaux, d'outils, etc.
Mais il passait sous silence le fait que cette terre avait été arrachée des mains des Albanais, parfois par la force. L'arrivée au Kosovo des montagnards monténégrins avec leurs traditions militaires était accueillie par des coups de fusil et, de temps en temps, avaient lieu des massacres d'Albanais auxquels on prenait leurs terres..."