Blanchot dans son siècle : Colloque de Cerisy
Le XXe siècle n'aura pas été le sien. Il y vécut pourtant presque tout le temps de sa longue vie, de 1907 à 2003. Mais rien ne pouvait lui appartenir : tout ce qu'il écrivit signifia que rien ne pouvait jamais appartenir à quiconque, ni l'oeuvre, ni l'amitié, ni même le pouvoir. Rien, davantage, ne pouvait lui revenir : tout ce qu'il pensa ne visa à reconnaître les singularités qu'en leur part maudite, sacrée, mystérieuse, spectrale. Ainsi, de son siècle, rien ne lui fut exactement contemporain : il fut tour à tour en retard, en avance, et finalement lointain. Mais ce siècle s'est écrit avec Maurice Blanchot, avec le ton d'une oeuvre et le mode d'un engagement dont les formes extrêmes (une abstraction concrète, une présence secrète) suscitèrent l'admiration et le dialogue, et aussi le mimétisme et le rejet. Il changea les règles de l'espace littéraire et même celles de l'espace philosophique et de l'espace militant. Si bien qu'il nous faut lire Blanchot dans son siècle et que telle est, paradoxalement, la condition même pour commencer à saisir ce qui dans son oeuvre subsistera, vivement, dans l'avenir. C'est à ces mouvements particuliers que répondent ici des lectures littéraires, politiques, philosophiques, théologiques, théâtrales et médicales. Elles apportent des regards singuliers sur une oeuvre qui ne s'est jamais pensée qu'avec tous, dans le souci d'une communauté qui ne se définit pas par les conditions de son appartenance mais par les effets de ses décisions.