Aux marges de la beauté
Voilà ce qu’aujourd’hui j’ai constaté : / Peu importe l’objet considéré, sa marge / Est toujours belle. C’est ainsi que débute le poème éponyme Aux marges de la beauté. C’est ainsi que pourrait se résumer la démarche d’Yinni. À travers ses œuvres, celle-ci jette sur toutes choses le regard faussement naïf d’une authentique marginale, qui sans cesse s’étonne des contradictions et des absurdités de notre monde contemporain, de nos ambitions dérisoires, de nos comportements destructeurs, de nos conventions creuses et de nos aveuglements. Armée de mots simples, d’un humour à la fois tendre et incisif et d’une profonde humilité, elle arpente en solitaire les frontières extérieures de la norme. Et cela sans jamais quitter le périmètre de sa propre existence, entre les ruelles de sa chère ville de Tamsui, les couloirs d’un hôpital où elle séjourne temporairement, sa maison pleine de chats, ou les rêves qu’elle projette sur les nuages et les étoiles au-dessus du fleuve auprès duquel elle vit. Yinni transforme ainsi le petit coin de terre qu’elle occupe dans le nord de Taïwan en un cosmos d’où penser l’humain, dans ses termes les plus universaux, et nous en rappeler la fragile et stupéfiante beauté.