La course au tigre
«La chair nivernaise s’est faite triste, hélas, et j’ai lu bien des livres», maugrée Bastien Sentiment, notaire. D’où nécessité de fuir «là-bas». Et ce «là-bas», c’est l’Inde. L’Inde, spacieux parc aux tigres où pour assouvir son érotique fringale de grosses prises, il atterrit à Calcutta sur Bengale, en plein hourvari politique et s’implante au Great Eastern Hotel (concierge Mr Sanjiv, dit le Manchot). Immergé dans la ville, le voilà qui hume, palpe, mastique, s’imprègne, quand sort des eaux gangéennes la terrible Shatee, divinité locale de l’indiano-bolchévisme, seule source possible de permis de chasse, avec laquelle il fusionne au fil de moult galipettes tantriques hautement sculpturales. Les amants randonnent en ville, de zoo en meeting, quand survient l’atroce nouvelle : exclu le permis de chasse et fusils mis sous séquestre. Seul le mariage dévérouillera cela, croit-il un moment. Que nenni, car l’État s’en mêle.
Après un Paris noyé, c’est une Calcutta délicieusement bourbeuse tel un bain de vase aux aromates où nous offre de descendre Emmanuel Pierrat avec cette tartarinade flamboyante comme une boîte de cigares, plus fessue qu’un Clovis Trouille et plus gouleyante qu’un curry de babouin aux cent saveurs : OH ! CALCUTTA !