Mascarade
Mascarade nous dit le titre, certes, mais d'autres, tout aussi bien, auraient pu faire l'affaire : Jeux de massacres , Foire aux monstres , etc.
En 1948, dix-huit ans après La Peur (1930, rééd. Le Dilettante), grandioses mémoires d'un lignard macéré au jus de trouille, quatorze ans après Clochemerle (1934), apologie provinciale du gosier pentu, du coup de rein jovial et de la ruade charcutière, Gabriel Chevallier remet les couverts avec minutie et voracité, le temps de quelques portraits-charge haut en couleur.
Alors, roulez bolides : ouvre le bal le colonel Crapouillot , un dur des durs de la (supposée) der des ders, qui « veut des morts » pour faire sérieux et dont les lignards, à grand renfort de ruses et de confraternités combattantes, arrivent à esquiver les dérives homicides ; lui suce la roue Tante Zoé dite « la Girafe », vieille fille pétomane ; s'invite ensuite au bal Ernest Mourier, petit homme gris, as de l'homicide domestique pour être, en fin de bail, cueilli par la folie et le babil caquetant d’un perroquet mâle ; complète le cortège J.-M. Dubois, placier en cirage d'un noir égal à celui du marché où il finit par s'épanouir et ... mourir ; clôt la marche un vieux, dit « le vieux », crispé sur son or.
Voilà l'ensemble ! Je vous l'emballe ? Cela s’appelle Mascarade, aurait pu s’appeler aussi Tombons les masques ! ou Ecce Homo : l'homme dans tous ses états. Et puis, comme dit l'auteur : « La vie n'est pas une rêverie, on ne s'en tire pas en jouant de la guitare. » ça, on avait compris. Chevallier for ever.