Ca va trop vite
On vous aura prévenu : cela va aller vite, et même bien trop. On détaille. La durée : trente ans, mais en trombe. Lieu quasi unique : le Bocal, une cité aquarium banlieusarde, toute de béton opaque, bien complète de sa faune étrange. Le héros, l’avorton raclure au mental pourri de rêveries yankees qui nous narre sa saga a tout du local lambda : père turfiste dingue, mère au foyer, grand frère « trois F : frime, filles et fringues ». Et l’on n’oublie pas Nadia, donneuse de joie. Ses débuts dans la vie, il les fait à coups de trafic de clopes, ce jusqu’au jour où il rencontre Lacrymo, le dealer. Alors là : choc ! révélation ! L’homme est albinos, semblant « le fruit des amours du lapin d’Alice et du chapelier fou ». Après une prise de contact plutôt rêche, notre héros, rebaptisé Epsilon, devient le bras droit de ce « Proust de la schnouf » : deal au quotidien pimenté de menus larcins. Les choses prospèrent, mais se corsent le jour où notre héros dénonce son frère à Lacrymo, qui renvoie la balle. Et son frère d’offrir Nadia la gagneuse à son club d’amis. L’affaire prend vite les proportions d’une poubelle, celle dans laquelle on retrouvera à l’aube la viande du grand frère allégé de sa mâchoire. Epsilon n’en continuera pas moins à tailler dans la vie sa trajectoire de teigneux : junkie un jour, dealer le lendemain, star de la variété le surlendemain. Rail de paillettes, ligne de strass. Pour clore cette dopante virée en zigzag, retour à la case Bocal avec suspense final infernal. Alors tout le monde en piste pour ce Scarface version Paris Nord, ou quand Tony Montana se la joue 9-3. Shake your booty !