Faux départ
Ma foi, qu'est-ce donc que la vie, la vie qu'on vit ? D'expérience, elle a la douceur d'un airbag en béton et la suavité d'un démaquillant à la soude, la vie ne serait-elle qu'une épaisse couche d'amertume sur le rassis d'une tartine de déception ? Pas moins, pas plus ? C'est en tout cas la démonstration que nous livre Marion Messina, l'Emmanuel Bove de ces temps, dans Faux départ, son premier roman. À ma gauche, Aurélie, à ma droite Alejandro ! Entre la Grenobloise de toute petite extraction qui crève la bulle d'ennui dans une fac facultative, souffre-douleur d'un corps en plein malaise, et le Colombien expatrié, ça s'aime un temps mais ça casse vite. D'aller de Paris en banlieue et de banlieue à Paris, d'oeuvrer comme hôtesse d'accueil, de manger triste, coucher cheap et vivre en rase-motte, rencontrer Franck puis Benjamin ne change que peu de choses à l'affaire. Renouer avec Alejandro ne modifie guère la donne : l'amour fou, la vie inimitable, le frisson nouveau sont toujours à portée de corps, mais jamais atteints. Toujours en phase d'approche, jamais d'alunissage. Marion Messina décrit cette frustration au quotidien avec une rigueur d'entomologiste. Que voulez-vous, la vie fait un drôle de bruit au démarrage. Jamais on ne passe la seconde. Faux départ, telle est la règle.