Breton à l'avant de soi
Critiquer une oeuvre ou une personne, replacer une poésie dans son devenir historique, avec ses contingences, ses défaillances, ses réussites aussi mais tenues dans ce cas pour de simples faits de littérature, ce pétait pas mon propos. Les grands poètes, et Breton en fut un, comme assez peu dans son siècle, méritent qu'on s'attache au meilleur de leur intuition pour en dégager la figure : laquelle, même trahie par l'inconséquence fatale, demeure leur vrai apport, demeure ce qui provoque et incite, ce qui ranime. Cessant en ce point d'essayer de dire, parfois peut-être confusément, ce que Breton signifia pour moi, je préfère me souvenir qu'il aimait par-dessus tout le vers de Rimbaud : « Mais que salubre est le vent! »; et mieux m'approcher de ces mots, en effet mystérieusement exaltants, en y découvrant la lumière de ce grand ciel d'orage, lavé, transparent, fait pour l'existence libre, que l'auteur de Pleine marge a su reconnaître dans l'aspiration poétique.