Artaud, l'aliéné authentique
Erre un aliéné authentique... : étrange expression par laquelle Arnaud évoque, à la fin de sa vie, la résistance de l'homme à la mort et au néant. " Je ne suis pas du tout Antonin Artaud de Marseille ", écrit-il alors, " mais Antonin Artaud de l'éternité ". Une des questions qu'explore ce livre est donc celle-ci : que signifie pour la pensée de la littérature moderne, qu'un sujet, héritier direct de Rimbaud, de Mallarmé, et très distant contemporain des surréalistes, puisse se dire infini, cherche à s'écrire à l'infini ? Comment lire ce geste sans mesure qui récuse toute notion d'Auteur pour s'affirmer Autre ? C'est cette mise en espace théâtrale, poétique et politique d'un devenir autre dans l'écriture qu'Artaud nomme, n'en doutons pas, aliénation. Se sentir animal, pierre, arbre, soleil... Ou Dieu, comme l'éprouva Artaud, n'est en rien l'apanage des " primitifs ", des enfants, des mystiques ou des fous. Pour quelques écrivains, philosophes et poètes, ce fut d'abord une expérience traversée dans l'écriture, une expérience extrême, bouleversante, de l'inhumain dans l'homme.