Utopies Sodomitiques : Diagonales de l'anal / De sodomia : Exposé d'une doctrine nouvelle sur la sodomie des femmes, distinguée du tribadisme
Quel peut être ce « crime abominable », ce « crime innommable », ce « crime infâme », cette « infâme dépravation », ce « crime si exécrable », cette « abominable dépravation », ce « vice infâme », cette « saleté », cet « ignoble plaisir », cet « usage ignoble » du corps, « ce crime abominable entre tous » inspirant « l'horreur », cet Horrendum - qui ne saurait être sanctionné que par l'obtruncation de la tête, la décapitation, le gibet, le bûcher, en subissant au préalable la torture par le feu, la flagellation, etc. ?Son nom, venu du texte biblique (« La clameur de Sodome et Gomorrhe est venue jusqu'à moi », s'écrie Dieu dans la Genèse), est Sodomie, soit « le coït dans le vase postérieur », selon la définition qu'en donne le R.-P. Sinistrari d'Ameno (c'est son vrai nom), dans son traité De Sodomia, extrait de son ouvrage De delictis et voenis, publié à Rome en 1754. On parle aujourd'hui, plus simplement, de coït anal, qu'il soit accompli entre couples hétérosexuel ou homosexuel. C'est une activité sexuelle tenue le plus souvent pour « perverse », « contre-nature », en tout cas dépréciée, comme l'illustre une injure « majeure en gravité », comme dirait le Révérend-Père, beaucoup plus usitée qu'on ne croit : « enculé ». La psychanalyse, en montrant le rôle important de la libido anale, du stade anal du développement sexuel et de l'anus comme zone érogène, a contribué à délester la vision de l'analité développée dans le traité du Père de sa dimension horrifique et criminelle. Il n'en reste pas moins que la sodomie, même entre époux légitimes, est, aujourd'hui encore assez mal vue, pour autant qu'on la voie, et considérée comme un délit grave dans de nombreux pays.La conception sodomale du Père d'Ameno est extrême ; « ce crime est des plus atroces, écrit-il et, selon l'avis de certains, c'est une espèce d'homicide. » Cela ne l'empêche pas de fouiller au plus profond de cet Horrendum, avec un luxe de détails et de références qui justifie que l'on puisse parler de « pornothéologie ». Il s'interroge longuement sur les pratiques distinctives des hommes et des femmes (précisions sur le clitoris), sur les modalités et conditions d'accomplissement du coït, le recours à des instruments fabriqués (verre, bois, cuir ou tout autre matière) « sur le modèle du membre viril », etc. Les descriptions, présentées sur le mode savant des sexologues et ethnologues, ont avant tout pour objectif manifeste (on pourrait s'interroger sur les motivations latentes) de définir la nature exacte du délit de sodomie, et de proposer un tableau des peines appropriées. Brûler vifs les coupables semble avoir la préférence des Pères de l'Église., et le Père d'Ameno cite quelques cas qui font froid dans le dos.