Lettres à Vadim Kozovoï (1976-1998) suivi de La Parole ascendante
L'échange épistolaire entre Maurice Blanchot, écrivain et critique français (1907-2003), et Vadim Kozovoï, poète russe, critique et traducteur de poésie française (1937-1999), s'étend sur 22 ans (entre 1976 et 1998).
Les lettres que nous proposons sont celles de Blanchot (au nombre de 186) à travers lesquelles cependant la figure de l'interlocuteur se profile suffisamment pour pallier cette lacune. La correspondance est singulière et riche d'information. Singulière parce que les deux hommes, sans jamais s'être rencontrés, ont su fonder une solide amitié ; abondante d'information parce que les lettres ne se limitent pas exclusivement à la chose littéraire.
Ce qui apparaît c'est un Blanchot insoupçonné : en effet, on savait qu'il vivait à l'écart du monde, mais on ne le connaissait peut-être pas aussi attentif aux questions d'actualité internationale et particulièrement passionné par la question russe - et par la Russie.
A l'époque où se noue cette relation épistolaire, Vadim Kozovoï est encore à Moscou (Cf. les 16 premières lettres) en attente de son visa pour la France où il arrivera en 1980.
Kozovoï connaît très bien la langue française et s'intéresse particulièrement au monde littéraire français. Dans le sillage de son père qui était enseignant en sciences sociales, spécialiste de la Révolution Française, il entre à son tour à la faculté d'Histoire de Moscou en 1954 et, dans son cursus universitaire, il rédige un mémoire intitulé : Le culte de l'esprit et de l'être suprême à la Révolution Française.
Par ailleurs il fait partie, en 1956, d'un cercle d'étudiants qui se consacre à la réflexion politique et en particulier à la situation hongroise et polonaise de l'automne 56. Il est arrêté par le KGB en 1957 pour son adhésion à des groupes clandestins anti-soviétiques, et est condamné à huit années de camp.
C'est dans les camps qu'il rencontrera (en 1962) Irène Emelianova, arrêtée en même temps que sa mère, Olga Ivinskaïa, compagne de Pasternak, accusée, après la mort du poète, d'infraction à la réglementation sur les devises pour avoir perçu des droits d'auteur de l'éditeur de Pasternak.
En 1963 Kozovoï est libéré. Il épouse Irène en Février 1964. De cette époque datent ses premières traductions. Cela lui permet d'entrer en contact avec René Char et Henri Michaux qu'il traduit. En 1976, il compose, traduit (en partie) et préface une anthologie des textes de Valéry sur l'Art. Cet ouvrage connaît en URSS un très grand succès. Il envoie son livre à Maurice Blanchot qui répond aussitôt : " J'ai bien reçu votre livre sur Paul Valéry. Je veux vous en remercier en vous disant combien j'ai été touché [...]. " engageant par là même une correspondance qui sera assidue.
Comme à l'accoutumée, hormis cet échange épistolaire, Blanchot se refusera à toute autre forme de dialogue (ni téléphone, ni rencontre).
Ces lettres sont suivies d'un texte théorique de Blanchot sur la poésie intitulé La Parole Ascendante... et d'un poème de Kozovoï dédié à Maurice Blanchot, Mélodie, tous deux parus dans un recueil de poésie de Vadim Kozovoï, Hors de la colline, illustré par Henri Michaux.