Nos amours de la France : République, identités, régions
Rencontre inattendue sur le terrain de la République et de ses régions : Danièle Sallenave, écrivain, et Périco Légasse, critique gastronomique basque passionné d’histoire, s’entretiennent de la place des régions dans la France d’aujourd’hui. L’enjeu de ce dialogue : un compromis entre régions et nation à l’heure européenne. Si les deux auteurs s’opposent fortement sur la question de la langue nationale et sur l’Europe des régions, ils trouvent un terrain d’entente sur les cultures locales et la nécessité de les préserver face à l’uniformisation marchande. Unité dans la diversité, la France a dû toujours se confronter à «ses petites patries». Jacobins et Girondins, centralisateurs et décentralisateurs, régionalistes et nationalistes, toutes ces figures reviennent hanter notre imaginaire national. Le séparatisme corse, basque, voire breton va-t-il s’imposer ? Dans le cadre de l’Europe, une fédération d’«états-nations» devrait voir le jour. Si c’était le cas, nous serions sommés de définir à nouveaux frais ce que l’on entend par «nation». Un dialogue décapant. Pour preuve : Périco Légasse : «Pourquoi la République est-elle si soucieuse de préserver le camembert et le Savennières par la loi, et pas ses langues régionales, qui comme nos merveilles agricoles, sont aussi un patrimoine national ? L’amour de la France appartient à ceux qui en font le choix, dès lors qu’on leur laisse la possibilité de se sentir français dans le respect de leur différence.» Danièle Sallenave : «C’est la France qui m’émancipe, moi qui suis née là par hasard mais qui vit ici par choix, bouge beaucoup, aime les voyages et les langues étrangères... Pourquoi ? Parce qu’elle n’est pas une «origine» qui vous enferme et vous ramène sans cesse à elle, mais un lieu d’où l’on part sans jamais le perdre, et où on peut revenir sans abdiquer sa liberté. Oui, c’est ça : j’habite un principe, une langue et une terre plurielle.»