L'Envers de l'esprit
Le théâtre n’a jusqu’ici pas assez défiguré l’homme, ôté notre tête, subverti nos concepts, déstabilisé en profondeur la syntaxe humaine, renversé la musique... Il ne nous a pas encore assez désappris. Cette offensive lancée en peinture contre la figure humaine par William Blake, Picasso, Goya, Picabia, Bacon, Soutine, Louis Soutter – mais aussi par l’art byzantin, oriental, africain – cette lutte contre les « propriétés psychologiques », contre les « vraisemblableries » et contre tous nos habits d’habitude, je l’ai vue dans le nô, chez Toto, chez Louis de Funès, chez Félix Mayol, Olivier Martin-Salvan, Dominique Pinon, Dominique Parent, Daniel Znyk.... Le théâtre est un endroit où lancer l’homme, le jeter autrement, le jouer d’un trait, le renouveler d’un saut, le ressusciter d’une chute. Ce qu’effectue l’acteur, et juste avant lui l’écrivain qui écrit le texte, c’est la « sortie d’homme ». Une ambulation, un voyage dehors. L’homme, l’acteur tente d’en sortir. Vraiment, une « sortie d’homme » est effectuée par l’acteur : c’est pour cette raison qu’il était juste de penser qu’une fois mort, il devait être enterré un peu à part.